mardi 8 mai 2007

Un ennemi de poids (9)

Vers 10 heures, Williams entra dans le bureau de Rousseau avec la liste des cabriolets rouges répertoriés dans la ville. Il y en avait une cinquantaine.
_ Je ne pensais pas qu'il pouvait y avoir autant de cabriolets rouges dans une seule et même ville. Et encore ! J'ai déjà opéré un premier tri : j'ai viré toutes les cabriolets de plus de 10 ans, et toutes celles qui n'étaient pas vraiment rouges, mais d'une couleur dérivée, comme le bordeau. Ca va faire un beau paquet à contrôler...
_ Sans compter que notre bonhomme n'est peut-être pas d'ici, ajouta Rousseau.
_ Par où on commence ? interrogea Williams.
_ Plaçons-les sur la carte, et commençons par celles qui correspondent au tracé de Benedetti.

Pendant ce temps, Benedetti était parti à la recherche du témoin de la veille, un clochard imbibé d'alcool qui cuvait souvent dans le vieux quartier. Son témoignage n'avait pas vraiment été creusé, vu l'état d'ébriété dans lequel il se trouvait. Benedetti se disait qu'il pourrait peut-être se souvenir d'autres détails, s'il était interrogé à jeun. Comme la marque de la voiture, voire sa plaque avec un peu de chance...

Il avait dit s'appeler Albert Fontaine, mais les clodos du coin l'appelaient Bill Gates, en référence au temps où il appartenait encore au « monde des vivants ». Il était alors PDG d'une boîte d'informatique. Pas une de ces start-ups qui a fait long feu lors de l'éclatement de la bulle internet, non. Une vraie grosse boîte bien solide spécialisée en infrastructures réseau, qu'il avait lui-même édifiée dans les années 1980. Il avait connu la grande vie, la très grande vie : voyages, belle maison, belle voiture, piscine... Puis les fonds de pensions avaient décidé qu'il devait passer la main. Tout ce qui lui restait maintenant, c'était un veston griffé Hermès qui ne ressemblait plus à rien.

Tout cela, Benedetti l'avait appris en se renseignant auprès de ses camarades de tape. Il semblait avoir bonne presse auprès des autres gars : aimable, poli, bien élevé, discret... Selon eux, il traînait souvent près de l'ancien cinéma Eldorado, transformé en ateliers d'artistes.

C'est effectivement là que l'inspecteur le trouva, en pleine conversation animée avec trois jeunes chevelus, visiblement des « artistes ». Le sujet de la conversation portait sur la nécessité ou non d'une dimension esthétique dans une création conceptuelle. Tous le quatre étaient assis sur les marches de l'Eldorado, faisant passer un pétard.

_ Albert Fontaine ? demanda Benedetti, exhibant sa carte. Sur le coup, le pétard disparu aussitôt sous la semelle de l'un des chevelus, et il se levèrent d'un même mouvement, prétextant une toile à finir, une expo à aller voir, un book à préparer...
_ Ici, les gens m'appellent plus souvent Bill, mais oui, c'est moi. Que puis-je pour vous ?

(à suivre...)

2 commentaires:

MarieScribouille a dit…

Pour Julie, ma plus fidèle lectrice ;)

Anonyme a dit…

Merci scribouille :-)
Ta plus fidele lectrice et impatiente de connaitre la suite !