dimanche 9 novembre 2014

NaNoWri-quoi ?

Novembre est connu par des centaines de milliers d'écrivains et aspirants écrivains de par le monde comme étant celui du NaNoWriMo (pour National Novel Writing Month. Infos sur www.nanowrimo.org). Kesako ? Un défi un peu fou que se lancent ces gens de tenter de rédiger un roman d'au moins 50.000 mots entre le 1er et le 30 de ce mois ! Ça fait quand même une moyenne de 1.667 mots par jour...

Quel est l'intérêt ? 
Principalement celui de lutter contre la procrastination (pas comme ce que je suis en train de faire, par exemple : rédiger ce blog post au lieu de rattraper mes 6000 mots de retard...), de se "jeter à l'eau", de se sentir entouré et soutenu dans ce labeur solitaire...

En effet, une grande communauté internationale et de nombreuses communautés locales se forment autour de cet événement, organisant régulièrement des rencontres réelles ou virtuelles pour faire avancer votre "word count".

Qu'est-ce qu'on gagne ?
La satisfaction d'avoir atteint un objectif ambitieux. Bien que les (nombreux) gagnants reçoivent quelques avantages, comme un beau badge et des réductions sur des logiciels d'écriture, par exemple, ce n'est pas le principal attrait du NaNoWriMo. La plupart des gens le font pour le plaisir du défi. Cependant, de nombreux écrivains ont réussi à faire publier ce qu'ils avaient rédigé durant ce mois de folie. Preuve s'il en est qu'un bon coup de pied aux fesses peut faire des miracles et qu'on peut écrire quelque chose de qualitatif même en si peu de temps !

Pour ma part, c'est la 2ème année que j'y participe. L'an dernier, j'ai abandonné après 8.000 mots, parce que je pataugeais dans l'intrigue, que je n'avais absolument rien planifié, et que j'avais du mal à trouver le temps nécessaire pour écrire. Là, j'ai déjà dépassé les 10.000 mots, et j'ai mieux préparé mon coup : j'ai un plan sous la main, quelques recherches effectuées, quelques ébauches de personnages... Je vous dirai en décembre si j'ai "gagné" mon NaNo, et je solliciterai peut-être vos avis sur mon texte via ce blog.

Ce qui me plait, c'est de faire la connaissance d'autres écrivains près de chez moi, de chatter avec eux sur IRC pendant mes séances d'écriture, de me mesurer à eux au cours de "word wars", de voir le compteur grimper avec satisfaction...

Et vous, avez-vous déjà participé au Nano ? L'avez-vous réussi ? Quelle satisfaction en avez-vous tiré ?



mercredi 8 octobre 2014

Devenir écrivain... du rêve à la réalité

Si vous êtes un peu comme moi, vous avez toujours rêvé de devenir écrivain. Sur les bancs de l'école, lorsque votre prof de français vous félicitait pour vos merveilleuses rédactions ou lorsque vos cousines vous sollicitaient pour pondre les leurs, vous éprouviez ce sentiment de fierté teinté d'orgueil. Lorsque vous avez dû choisir vos études supérieures, vous avez opté presque sans réfléchir pour une filière littéraire. Votre parcours professionnel est emplis de mots et vous passez une bonne partie de vos journées à mettre en pratique ce don de l'écriture pour votre employeurs ou vos clients, lesquels se montrent d'ailleurs souvent aussi admiratifs que votre vieux prof de français.


Mais lorsqu'il s'agit d'écrire, je veux dire, VRAIMENT écrire... vous avez tendance à vous débiner - parfois - et à procrastiner - souvent.

Un blog ? Quelle bonne idée ! Chouette, je m'y mets tout de suite. Premier post. Second post. Puis très vite, pfff... là, ce soir, j'ai plutôt envie de regarder la télé. Chuis crevée. J'ai pas d'idée. Mon dernier post date d'il y a moins d'un mois, deux, enfin bref, pas si longtemps, ça peut bien attendre encore un peu. Toutes les excuses sont bonnes.

Un roman ? Allez, j'attaque ! Tiens, pour me motiver, je me lance un vrai défi : écrire un premier jet de roman de minimum 50.000 mots en 30 jours. Tenir une moyenne de 1667 mots par jour, ça doit être envisageable, non ? C'est cool : on est tout un petit groupe, on fait des connaissances, on chatte sur IRC comme au bon vieux temps, on se fait des write-in, des word-war... Quoi ? Seulement 9.000 mots à la fin du mois ? C'est pas bien grave, puis y avait des excuses : c'était un mois chargé.

Ce qu'il me manque, c'est du temps !

C'est sans doute ce que vous vous dites. En tout cas, moi c'est mon excuse principale. C'est vrai, quoi! Le boulot, les trajets, les enfants... le soir, on n'a plus beaucoup le courage et on a souvent envie de se vider la tête. Puis, un jour, il m'est arrivé une bonne mauvaise nouvelle : j'ai perdu mon emploi. Aouch ! Ca fait mal, mais je vais pouvoir en profiter pour écrire, enfin. Tu parles...

Bon, ok, même si on postule très sérieusement, faut bien admettre qu'on n'y passe pas huit heures par jour. Mais déjà, au chômage, les journées ne font plus huit heures, puisqu'elles commencent plus tard et terminent plus tôt. Ben oui, forcément, on fait des économies : fini la garderie après l'école, faut y être à 15h10. Puis, comme on ne bosse pas, ben on fait des choses qu'on n'a pas le temps de faire d'habitude, on s'occupe un peu plus du ménage. Et quand on a fini de s'occuper du ménage, qu'on a checké les offres d'emplois, rédigé deux-trois lettres de motivation, rempli les formulaires de candidature ad hoc, on s'offre un peu de répit.

Facebook est ton ennemi

Pour ma part, je suis victime d'une force d'attraction irrésistible envers ce bouffeur de temps de Facebook (enfin, Pinterest n'est pas en reste...). Plutôt que d'avancer sur le plan et la documentation de mon projet en cours, je surfe d'un article essentiel intitulé "31 photos de bébés animaux pour vous rappeler que le monde est merveilleux" à une pétition pour supprimer une page faisant l'apologie de la violence envers les chiens en passant par une vidéo même pas très drôle de gars qui se sont miraculeusement sortis indemnes d'accidents de la route.

Le temps que je m'offre cette petite parenthèse, il est quasiment l'heure de manger, et je sors acheter de quoi me sustenter. Une fois ce besoin physiologique assouvi, il est presque l'heure d'aller chercher blondinette à l'école, ça ne vaut pas la peine de s'y mettre pour si peu, donc hop ! De retour sur Facebook (ou Pinterest, ou Twitter, ou Amazon...) pour patienter jusque-là.

Que se cache-t-il derrière la procrastination ?

Cette inextinguible besoin de gaspiller sa vie au lieu de réaliser ce pour quoi vous êtes fait, à savoir écrire, trouve généralement son origine aux tréfonds les plus mystérieux de votre psyché. Là où se cachent vos peurs. La plus pressante d'entre elles étant le plus souvent la peur de se planter.


  1. Il n'y a que ceux qui ne font rien qui ne se trompent jamais. C'est vrai. Tant que vous n'êtes qu'un "aspirant-écrivain", tout le monde se répand en louanges dès que vous écrivez un texte, vous disant à quel point vous devriez écrire "pour de vrai", parce que vous faites ça si bien... Alors qu'une fois que vous serez reconnu, vous vous exposerez à des critiques sévères, à commencer par celles des maisons d'éditions, puis si vous avez la chance d'être publié, par celles des journalistes et pire encore : celles de vos lecteurs !
  2. La page blanche, cette irréductible ennemie. Comme tous ceux qui écrivent, fût-ce à la plume ou au clavier, vous redoutez ce fameux blocage. Ce moment où votre cerveau est complètement vide et incapable de pondre le moindre mot. Parfois, vous avez bien une idée, mais vous ne savez pas sur quel fil tirer pour en faire une histoire. Parfois vous avez une histoire, mais vous avez beau tirer sur le fil, vous vous trouvez face à un sac de noeuds impossible à dénouer. Que ce soit un problème d'imagination (laquelle est un muscle que l'on peut entraîner facilement à l'aide de "writing prompts") ou de structure, il existe des milliers d'articles de par le web pour aider à vaincre cette peur. J'en ai rassemblé quelques-uns (souvent en anglais) sur un tableau Pinterest, si ça vous dit... Je trouve d'ailleurs que c'est un très bon outil de documentation et d'inspiration.
  3. Rêver sa vie est parfois plus confortable que de la vivre. Même si vous avez la trentaine bien tassée, vous vous dites encore "quand je serai grand(e), je serai écrivain" ? Un peu comme vous vous achetez un billet d'Euromillions juste pour le plaisir d'imaginer ce que vous feriez avec tout cet argent. Vous ne devez pas forcément viser de devenir immédiatement la prochaine Amélie Nothomb (ou J.K. Rowling, si vous avez des ambitions de milliardaires) pour choisir de commencer à vivre de votre plume. Vous pourriez déjà vous lancer comme copywriter ou comme biographe. Ca a l'avantage d'entraîner votre muscle d'écriture tout en vous fournissant la matière première, et donc en évitant le blocage lié au manque d'imagination.

Qu'est-ce qu'on fait maintenant ?

On s'y met ! On intègre l'écriture dans la routine quotidienne. Commencez par décrire votre journée-type, du lever au coucher, avec les heures et durées de toutes vos activités récurrentes. Et essayez d'y caser trente minutes d'écriture par jour. Et de vous y tenir pendant 21 jours. C'est le temps qu'il faut pour en faire une habitude. On s'y met ensemble ? C'est pas la première fois pour moi, mais...

... c'est décidé, j'écris ! ;)

Et vous ?



vendredi 29 août 2014

TEST : avez-vous la fibre d'un copywriter ?

Vous aimez écrire, et vous aimeriez en vivre. Mais vous êtes aussi lucide : c'est pas demain la veille que vous serez J.K. Rowling et en attendant, il faut bien payer les factures.
Alors vous vous dites "pourquoi ne pas se lancer comme copywriter" ? Cela semble plus accessible et permet plus facilement de vivre de sa plume.
Voici quelques questions qui vous permettront de savoir si c'est un métier fait pour vous...

Etes-vous un caméléon ?


Etes-vous capable de vous fondre rapidement dans différents styles, d'appréhender divers secteurs d'activités, de vous approprier un jargon ?  Vous serez tour à tour journaliste lifestyle, vendeur de voiture, économiste, juriste, scientifique, blogueur... C'est aussi une qualité indispensable du romancier, qui doit se découvrir des personnalités multiples pour pouvoir donner du relief à ses personnages.

Avez-vous la fibre commerciale ?


Non seulement, c'est utile pour pouvoir rédiger des contenus commerciaux (parvenir à rédiger un texte vendeur, transformer par exemple les caractéristiques d'un produit en avantages pour le client, etc.). Mais c'est aussi essentiel pour vendre vos propres services à vos clients. Vous êtes un freelance. Vous devez prospecter pour trouver vos clients, entretenir vos relations d'affaires... Ce sera également utile quand vous essayerez de vous faire publier en tant qu'auteur et que vous devrez vendre votre oeuvre aux maisons d'éditions. ;)

Réagissez-vous bien à la critique ?


Vos clients (ou les clients de vos clients, si vous travaillez pour des agences) n'accepteront que rarement vos premiers jets. Ils vous demanderont de reformuler, compléter (et tant pis si vous avez déjà dépassé le nombre de caractères prescrit), réagencer, voire recommencer ! Ils changeront d'avis, reviendront parfois sur leur briefing... S'il ne faut pas forcément tout accepter aveuglément sans réagir (vous êtes l'expert en communication, votre client est expert de son produit), il faut néanmoins pouvoir s'adapter. Après tout, votre futur éditeur aussi vous fera remettre cent fois l'ouvrage sur le métier.

Savez-vous écrire sous pression ?


Il arrive régulièrement que les briefings soient donnés tardivement et que votre texte soit attendu pour hier. Ou alors, vous avez largement le temps, mais un débrief' arrive en dernière minute et vous devez réagir immédiatement. Ecrire sous pression peut s'avérer éprouvant. Mais dites-vous que c'est un bon entraînement pour votre future vie d'auteur publié : quand vous aurez perdu des mois à procrastiner devant votre page blanche et qu'il ne vous restera que quelques semaines pour pondre votre prochain best-seller !

Avez-vous l'âme d'un mercenaire ?


Un mercenaire vend ses services et ne se soucie guère de l'odeur de l'argent. Bien que vous ne soyez pas obligé de faire pareil, y a-t-il des sujets sur lesquels vous refuseriez d'écrire ? Ou des clients pour lesquels vous ne souhaitez pas travailler ? Par exemple, si vous êtes un ardent défenseur de la planète, pourriez-vous écrire pour une compagnie pétrolière ? Si vous passez par l'intermédiaire d'agences, vous pouvez risquer de perdre d'autres opportunités en refusant un job. Pas toujours évident de choisir entre éthique personnelle et faire rentrer de quoi payer quelques factures...

Vous avez répondu une majorité de OUI ?

Alors vous avez probablement les qualités requises pour louer votre plume.
Quelles autres qualités sont nécessaires ou utiles selon vous ? N'hésitez pas à les ajouter en commentaires ci-dessous. J'éditerai ce post avec les plus pertinentes d'entre elles :)

mardi 26 août 2014

C'est décidé, j'écris ! (bis)

Quand j'ai lancé ce blog en 2006, j'étais jeune mariée, nous emménagions dans notre nouveau chez nous et n'avions d'enfants encore qu'en rêve.
Je me souviens des débuts enthousiastes. Je venais de lire un livre, "Les italiques jubilatoires", qui avait réveillé en moi le besoin d'écrire régulièrement. Je me régalais à imaginer une galerie de personnages, me disant qu'ils pourraient peut-être servir de base à un futur roman. Au début, ça venait tout seul... Je me mettais le soir derrière mon clavier, avec juste une simple idée de départ, et les mots se déroulaient sous mes doigts sans que j'aie même à les y inviter.

Puis, emportée par mon élan, je me suis lancée dans des histoires plus longues (Un ennemi de poids et Oscar et Fred). Et là, patatras ! La même recette ne fonctionne pas pour des textes plus longs. Au départ, il y a une image, un concept, qui me vient en tête, et je me dis "tiens, ça serait chouette d'en faire une histoire". Alors je me mets à mon clavier, et je commence à écrire. Mais sans plan, sans intrigue(s), sans personnages prédéfinis, avec chacun leurs propres backgrounds et objectifs, on finit par rédiger un truc plat, linéaire, sans rebondissements... et on s'essouffle.

C'est ce qui m'est arrivé. J'ai calé, mes histoires ne menant nulle part, et je n'arrivais pas à les abandonner pour revenir à ce qui marchait bien pour moi : des textes courts, rythmés et efficaces.

Alors la routine a pris le dessus, je me suis encroûtée, et je n'y ai plus touché. J'aurais pu accuser les enfants, mais mon aînée est née en 2010, alors j'ai pas vraiment d'excuse...

Début de cette année, j'ai refait une tentative, avec "La belle endormie". J'étais plutôt satisfaite. Mais allez savoir pourquoi, cela n'a pas suffit à relancer la machine. Pourtant, on aurait pu croire que le fait de faire pour la première fois l'expérience du chômage (depuis mi-avril 2014) m'aurait donné enfin le temps de me consacrer à l'écriture... J'ai toujours blâmé le manque de temps pour justifier que je n'arrivais plus à écrire. Mais là, rien. J'ai bien commencé un brouillon, mais j'ai à peine deux paragraphes et je suis déjà bloquée. Je lis des tas de conseils sur la meilleure façon de planifier, développer l'intrigue, les personnages... mais mon imagination est comme bloquée.

Alors voilà. J'ai envie d'écrire, c'est sûr. Pour l'instant, je n'arrive pas à puiser en moi la matière pour le faire. Je suis au chômage, donc c'est une opportunité pour orienter ma carrière. Alors, je me dis qu'écrire, quoi que ce soit, c'est déjà faire travailler les bons muscles : celui du style, de la construction... J'ai donc décidé de proposer mes services en tant que copywriter et biographe.

Copywriter, c'est facile : je l'ai fait pendant des années, d'abord en agence, puis chez mes divers employeurs, et en activité complémentaire. Cela permettra de faire des rentrées plus ou moins régulières.

Biographe, c'est autre chose. L'idée m'est venue alors qu'avec mes cousins, oncles et tantes, nous avons offerts les services d'une biographe à ma grand-mère pour ses 85 ans. Avec ma formation de journaliste, j'ai les capacités pour poser les bonnes questions, construire un récit, le documenter. Et je me dis que cela me permettra d'écrire de belles histoires sans avoir à trouver la matière première, puisqu'elle m'est offerte. Et qui sait, peut-être cela me donnera-t-il aussi de la matière à des récits de fiction ?

Alors voilà, pour la seconde fois, c'est décidé, j'écris !



vendredi 28 février 2014

La belle endormie

Elle se réveilla brusquement, sans comprendre où elle était. Sans parvenir à ouvrir les yeux. Sans parvenir à faire le moindre mouvement. Elle avait déjà eu ce genre de rêves ou l'on rêve qu'on se réveille... Il se passe des choses, souvent mauvaises, on veut parler, bouger, se lever, mais on reste emprisonné dans son propre corps comme sous une chape de plomb.

Un autre craquement assourdissant. C'était un bruit similaire qui l'avait tiré de son sommeil.

Elle était prise d'angoisse et de panique, elle se débattait intérieurement pour se libérer. Elle appelait, pleurait, hurlait, mais aucun son ne sortait de sa bouche. Elle avait la gorge si sèche que chaque déglutition lui donnait l'impression d'avaler du sable.

Elle entendait maintenant de nombreux autres sons. Comme des grattements, ou des frottements, parfois des coups... Et puis ce qui ressemblait à des voix, mais très lointaines et assourdies. Elle ne comprenait rien de ce qu'elles disaient. A l'intonation et au débit, elle devinait une sorte d'excitation. Instinctivement, cela l'effraya encore plus.

Elle était toujours enfermée dans son corps. Il fallait qu'elle reprenne possession de ses moyens. Faire abstraction de ce qui se passe autour d'elle et se concentrer sur la moindre parcelle de son corps pour en prendre pleinement conscience. A commencer par ses pieds. Elle tenta de remuer les orteils. La première tentative échoua. La seconde également. Ainsi que les suivantes. Mais elle essaya encore et encore et finit par remuer les deux gros orteils, de concert, au bout de ce qui lui sembla une éternité.

Les voix s'approchaient, elle commençait à distinguer les sons plus clairement. On aurait dit qu'ils parlaient une langue étrangère, mais elle ne la reconnaissait pas...

Il ne fallait surtout pas qu'elle se laisse déconcentrer... Ses orteils bougeaient. Maintenant les chevilles. Ce fut un nouveau combat contre elle-même. Et pendant qu'elle essayait vainement de bouger ses articulations, des bribes de souvenirs remontaient à la surface.  D'abord une profonde tristesse.

Les chevilles. Bouger les chevilles.

Elle se revoit debout dans sa chambre, un verre de vin lui échappe des mains et vient se briser en mille éclats sur les dalles. Elle s'effondre au sol en un hurlement.

Ca y est ! La cheville gauche a sursauté. Maintenant la droite...

Elle est à genoux et se jette de la terre sur la tête. Autour d'elle, des pleurs de femmes.

Les deux chevilles remuent maintenant, comme si ces souvenirs aidaient son corps à revenir à lui.

Poc ! C'était très proche, cette fois. Comme si on avait frappé à la porte. Une voix s'exclame, appelle les autres. Elle ne comprend toujours pas ces que ces hommes racontent. Ils sont étrangers, c'est sûr. Mais elle n'a jamais entendu ce dialecte avant.

Nouveau souvenir. Elle se revoit aux côtés d'un homme séduisant et sûr de lui. En posant son regard sur lui, elle ressent un amour profond et un respect sincère. Devant eux défilent des gens de tous les horizons. Elle a entendu de nombreux langages, mais aucun ne ressemblait de près ou de loin à celui de ces hommes. Il faut qu'elle parvienne à reprendre le contrôle, et vite ! Ils approchent. Elle doit être en mesure de fuir, ou de se défendre, ou de supplier, ou...

Ssshhhh... Un frisson vient tout juste de parcourir son échine ! Est-ce l'espoir ou l'adrénaline, mais à ce moment, elle se sent plus forte que tout les cauchemars emprisonnants du monde, et parvient à remuer les doigts, les poignets et même les coudes... C'est alors que sa main entre en contact avec une paroi dure et froide. Cette sensation... Un autre flash et elle comprend que l'homme qu'elle aimait est mort. Ce deuil...

Lumière aveuglante.

D'un coup, les voix excitées se sont tues et un silence de mort s'est abattu dans la pièce.

Elle ne voit rien. Est-ce parce que ses yeux refusent encore de s'ouvrir ou à cause de cette lumière horrible ? Mais elle peut les sentir. Ils l'ont trouvée. Ils ont l'air surpris, car aucun ne bouge. On dirait presque qu'ils retiennent leur souffle... C'est le moment ! Elle rassemble ses forces, pousse un hurlement et mets tous ses membres en action pour fuir aussi vite qu'elle peut.

Malheureusement, ses gestes son beaucoup trop lents. Elle voulait bondir sur ses jambes et se mettre à courir, mais tout ce qu'elle a réussit à faire, c'est lever les deux bras et la tête comme un bébé qui réclame sa maman. Ils vont l'attraper; elle est à leur merci.

Mais à sa grande surprise, alors qu'elle attend que leurs mains se referment sur ses poignets d'un instant à l'autre, c'est une scène tout autre qui prend vie sous ses yeux. Les hurlements fusent de toutes parts, les hommes prennent la fuite ventre à terre, laissant tomber avec fracas les armes qu'ils semblaient tenir en main. L'un d'eux s'effondre au sol, purement et simplement. Et bientôt elle se retrouve à nouveau seule. Elle en profite pour se glisser hors de son lit et pose les deux pieds à terre. Le sol est froid. Elle se déplace laborieusement, toujours aveuglée, les mains tendues en avant pour repérer les obstacles. Elle perçoit une odeur d'urine, sur sa gauche. Il semblerait que l'homme qui s'est effondré là n'est pas mort, mais s'est fait dessus. Elle sent son regard posé sur elle et les tremblements de sa respiration. De quoi ont-ils si peur ? Elle essaie de lui poser la question, mais les sons qui sortent de sa bouche ne sont pas compréhensibles. Comme si sa langue était endormie... L'homme s'évanouit à nouveau. Elle décide alors de poursuivre son chemin et de se trouver une cachette. Tâtonnant, elle trouve un mur, puis une ouverture dans ce mur, qui donne sur un couloir. Elle décide de fuir l'aveuglante lumière et de s'enfoncer dans les ténèbres, où elle trouvera une une cachette plus sûre, le temps que ces hommes se lassent de la trouver.

....

- Vous vous foutez de ma gueule, n'est-ce pas ?
-  Non, Monsieur, je vous assure... Elle était là, elle...
- Ce que vous essayez de me dire, c'est que vous avez perdu une momie vieille de 4500 ans ?
- Non, ce n'est pas ça, elle s'est...
- Comment ça "elle s'est..." ? Quoi ? Elle s'est quoi ?
- ... enfuie. Monsieur.