lundi 27 mars 2006

Vladimir Petit n'a pas choisi

Vladimir n'est pas russe, et il n'est pas grand non plus...

Rififi à l'Etat Civil

Dinant - 1 avril 2003. Un fonctionnaire de l'Etat civil modifie les actes de naissance dont il se charge. Le petit Jonathan Assin devient Marc, Julien Dalors devient Homer,... Inculpé d'abus de pouvoir, le fonctionnaire indélicat modifiait les certificats après la déclaration des parents. Ceux-ci s'appercevaient parfois plusieurs mois plus tard que le prénom officiel de leur enfant avait été changé. (Suite en p. 12)


La maman de Vladimir était une fervente admiratrice de Vladimir Krpan, célèbre pianiste croate s'il en est. Jeune professeur de musique au Collège Notre-Dame de Bellevue à Dinant, Marie-Joëlle Simonet avait tout juste 22 ans lorsqu'elle tomba éperduement amoureuse de Francis Petit, pion dans le même Collège Notre-Dame de Bellevue, de 5 ans son aîné. Elle en avait 23 en novembre 1962 lorsqu'elle donna naissance au fruit de leurs amours, dans l'appartement trois pièces qu'ils occupaient depuis leur mariage, il y avait six mois de cela.

Elle accoucha dans un environnement modeste mais chaleureux, d'un charmant bambin qu'elle prénomma Vladimir sans provoquer de grande contestation dans le chef de son Francis, qui n'était pas homme à se soucier du choix d'un prénom.

Francis Petit était un brave et honnête homme. Droit, sérieux et discipliné. Il aimait sa femme et son fils de tout son coeur, mais ça n'était ni dans son caractère, ni dans son éducation que de se répandre en louanges et compliments divers. Son amour, il le leur montrait en travaillant dur, tentant de gravir un à un les échelons de la hiérarchie scolaire. De pion, il passa à surveillant en chef, puis préfet de discipline.

Vladimir hérita les yeux gris et la petite taille de sa mère, les cheveux rares et le sens de l'humour de son père.

Autant dire que ses années d'enfance, et pire encore d'adolescence, ne furent pas une partie de plaisir. Si ses parents l'aimaient, ils ne se rendirent jamais compte de l'enfer que vivait au quotidien le petit Vladimir Petit. Moqué par ses camarades de classe sur l'étonnante adéquation de son patronyme, interrogé sans cesse sur ses inexistantes origines russes, Vladou - comme l'appelait tendrement sa maman - envisageait chaque lundi comme une nouvelle punition.

Il passa ces 12 années à rentrer la tête dans les épaules et à concevoir pour de ses parents une amertume non dénuée de colère. Bien sûr, il les aimait, mais il pouvait difficilement les pardonner de l'avoir affublé d'un tel nom. Il savait bien que Vladimir en soi n'est pas un vilain prénom, mais on l'avait tellement charié sur ses origines ("éh, le ruskof!", "Chante-nous l'Internationale!",...) qu'il ne pouvait l'apprécier. Et associé au nom de Petit, quand on mesure un mètre soixante-trois, ça devient carrément une tare.

Vladimir Petit décida de devenir fonctionnaire. Après des études en droit administratif, il passa tous les concours nécessaire et fut nommé à l'Etat civil de sa commune de Dinant.

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